Sur la plage de Chesil : cauchemar d’une nuit de noces qui va tout changer

Adapté du roman du même nom paru en 2008 et signé de l’auteur anglais Ian McEwan, Sur la plage de Chesil arrive dans les salles françaises ce mercredi, et nous invite à partager la nuit de noces d’un jeune couple qui va tourner au fiasco.

Florence et Edward se sont mariés le matin même. Dans leur chambre nuptiale d’un hôtel qui surplombe la plage de Chesil, ils partagent un repas sous l’oeil moqueur d’employés amusés par la fébrilité qui se dégage du jeune couple. Ils n’osent à peine se parler, sinon pour échanger quelques banalités ou briser un silence trop pesant. Tous deux ont déjà en tête l’épreuve suivante qui les attend : la consommation du mariage. On est au début des années 60, la révolution sexuelle n’a pas encore eu lieu. Tous deux sont vierges et inexpérimentés. Florence a bien lu quelques livres d’éducation sexuelle pour découvrir ce qui ce fait, et de quelle façon. Mais le dégoût engendré par l’acte sexuel à venir n’en a été que plus grand. Edward, lui, se doit d’être à la hauteur, pour cette première fois. Les deux sont tétanisés au fur et à mesure que le lit se rapproche. Et ce lent effeuillage dure une éternité. Chaque geste est maladroit, chaque mot prononcé ne semble pas être le bon.

Sur la plage de chesil
Saoirse Ronan et Billy Howle sont bouleversants dans Sur la plage de Chesil

Sur la plage de Chesil nous fait partager cette lente agonie entre deux jeunes mariés qui pourtant s’aiment, mais n’osent exprimer leurs craintes, leurs répulsions ou leurs angoisses, de peur de décevoir l’autre. Florence n’est clairement pas prête et repousse comme elle peut le moment fatidique. Edward sait qu’il ne peut pas se dérober et tente de son mieux de sauver les apparences. Le résultat est un fiasco magistral, où Florence finit par s’enfuir de la chambre pour rejoindre la plage. Un fiasco filmé de façon superbe par Dominic Cooke, dont c’est la première réalisation. Chaque hésitation est entrecoupée de flashbacks nous relatant la rencontre entre ces deux âmes en peine. Elle, est issue d’un milieu aisé, musicienne classique de talent qui rêve de faire carrière. Lui, est d’un milieu beaucoup plus modeste, vivant à la campagne avec une mère qui n’a plus toute sa tête. Il est passionné d’histoire et des grands hommes qui l’ont composée. Et à Schumann ou Beethoven, il préfère largement Chuck Berry. Et pourtant ces deux-là se sont trouvés et se sont aimés quasiment instantanément. Leur attirance est sincère mais le manque de communication dans une époque où les traditions et le poids des conventions sociales pèsent comme un fardeau va leur être fatal. Le spectateur souffre en silence avec ces deux tourtereaux tétanisés. On a plus d’une fois envie de crier à l’oreille de Florence de lui dire tout simplement ce qu’elle ressent. Parlez-vous franchement et tout ira bien ! Mais en 1962, cela ne se fait pas.

Et cette sublime agonie est bien évidemment le résultat d’un duo magnifique à l’écran. Saoirse Ronan est parfaite (comme toujours) en incarnant une Florence pétillante et joyeuse dans les flashbacks, et un être terrorisé par ce qui l’attend sur le lit nuptial. Et Billy Howle, dans le rôle d’Edward, l’est tout autant. Enjoué et passionné dans les retours en arrière montrant leur amour naissant, il est excellent dans les balbutiements de chacun de ses gestes au pied du lit.

Si l’on gardera bien évidemment pour nous l’épilogue de cette nuit de noces cauchemardesque, Sur la plage de Chesil pourrait néanmoins se résumer à cela : lorsqu’un petit rien change tout. De n’avoir su la retenir sur la plage, les vies de Edward et Florence ont été changées à jamais. Et c’est superbe à l’écran.

 

Credit photos (c) Mars films.

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